Le four à chaux de Tribies : un témoin du patrimoine industriel local.

Situé au dessus du pont noyé et au départ du chemin de Ginane, ce four à chaux a appartenu à de nombreuses familles. La proximité de la rivière Avène explique le choix de l’emplacement de ce four qui lui fournissait abondamment l’eau dont il avait besoin. Il est situé également tout prés de collines calcaires qui fournissaient la matière première sans qu’une carrière soit clairement identifiée à proximité. Ce four à chaux artisanal ancien[1], daté du XVIème siècle, est du type intermittent à longues flammes.

Le four nécessitait, pour le faire fonctionner, d’un spécialiste en combustion et d’une importante main d’œuvre pour l’alimenter en bois et en cailloux de calcaire.

La calcination de la pierre constitue l’art proprement dit du chaufournier[2], qui a pour but de convertir en chaux, par l’action du feu, les pierres calcaires dites pierres à chaux. Après fumage[3], la pierre est soumise à une forte chaleur, immédiate, continue et non interrompue. Le four était alimenté par des couches de fagots et du bois a fort pouvoir calorifique[4] alternées avec des couches de pierres calcaires. La calcination durait trois jours et trois nuits[5] et il fallait se relayer pour y maintenir une température constante entre 900 et 1 100 degrés. Les flammes passaient au travers des couches de pierres de façon homogène. Une couche de terre d’argile recouvrait le pourtour de la voûte pour garder la chaleur. L’eau contenue dans la pierre s’évaporait, sans provoquer l’éclatement des blocs, puis c’est la décarbonation et la perte de gaz carbonique (C0²). La pierre calcaire, ou carbonate de calcium, se transforme ainsi en oxyde de carbone.

En fin de cycle de calcination des blocs de calcaire, on obtenait de la chaux vive utilisée comme désinfectant. La chaux vive ainsi produite continuait sa descente vers son refroidissement avant d’être extraite. Ensuite, c’est le passage de la chaux vive à la chaux éteinte par l’extinction, phénomène d’hydratation, par arrosage manuel, ou par immersion des blocs de chaux. Ces deux procédés fournissaient la chaux éteinte sous forme de poudre. La chaux, ainsi produite, était utilisée dans deux secteurs précis pour répondre aux besoins immédiats de la population de nos campagnes :

  • pour un usage agricole : dans le but de chauler les terres acides, cela signifie étendre de la chaux éteinte sur les sols pour neutraliser les terrains trop acides. Le but pouvait être, aussi, d’assécher les sols humides. Dans les habitations, elle était utilisée pour blanchir les murs, désinfecter les étables par badigeon de lait de chaux.
  • dans le bâtiment : en maçonnerie pour construire des mas ou hameaux. Associée à du sable et de l’eau, la chaux éteinte servait à lier les pierres de construction des maisons du village et devenait, avec le temps, un matériau très résistant. A noter que ce four a servi à construire le hameau de Tribies et bien des mas environnants.

Avec le progrès, les fours à chaux ont été abandonnés. Celui de Tribies a été sauvé de la ruine sous la Commune[6]. Le four n’a pas retrouvé sa forme originelle, le foyer était plus haut et formait une arche sans terrasse. Le four sert maintenant à marquer les niveaux de crues de l’Avène et appartient au petit patrimoine bâti de la commune qui l’a restauré au fil du temps.

Dans un souci de sauvegarde du patrimoine industriel de Saint-Hilaire de Brethmas, la Commission Municipale « Projets et Aménagements »  a financé la restauration du four, légué par Michel Gaude en 2002, et les lieux ont été pourvu de bancs, de tables et de poubelles, afin d’y accueillir les promeneurs et les amateurs de vieilles pierres.

L’accès du lieu destiné à la visite a été sécurisé comme l’exige la réglementation et la voûte du four renforcé afin de garantir sa bonne tenue mécanique dans le temps car il est situé en zone inondable.

 

 

[1] Il apparaît sur le cadastre napoléonien de 1837 sur la parcelle n°908.

[2] Le chaufournier est, dans la production de la chaux vive, l’ouvrier conducteur du four à chaux. Par extension, il désigne l’exploitant du four à chaux.

[3] Mise en température du four.

[4] Comme le chêne vert qui est un bois de chauffage à fort pouvoir calorifique, brûlant lentement, produisant beaucoup de braises et des cendres riches en potasse. Cela explique, aussi, les nombreux défrichements dans les environs de la commune.

[5] S’il ne pleuvait pas car il n’était pas fermé.

[6] Période entre le 18 mars et le 28 mai 1871, la Commune de Paris est le nom donné au mouvement révolutionnaire et au gouvernement insurrectionnel qui fut mis en place à Paris, après la guerre de 1870-1871 contre les Prussiens.